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Conclusion

Le romantisme s’inscrit dans une période marquée par le début d’une réflexion sur le rêve. Ce mouvement artistique est précurseur de l’utilisation du rêve comme source d’inspiration. Les œuvres qui en découlent sont associées à un questionnement sur la véracité des visions oniriques. Les surréalistes ayant connaissance du travail romantique et de son évolution cherchent à se surpasser en passant par l’inconscient. Le rêve est alors le meilleur outil permettant d’y accéder.
En parallèle des premières recherches scientifiques sur l’inconscient -et donc sur le rêve- se développe chez les romantiques des interrogations concernant l’activité onirique. Ils seront les premiers à revendiquer le songe comme inspiration et à utiliser le mot « rêve ». Il s’agit ici d’un monde parallèle au monde réel, sorte de miroir déformé qui permet l’accomplissement de tous les désirs romantiques. Le monde du rêve est un substitut, une alternative, au monde où ils se sentent persécutés, rejetés. Cependant, les romantiques se doutent que le rêve n’est pas que fantastique mais fondé sur des bases psychologiques : c’est la prise de conscience d’un phénomène scientifique quoique encore mal compris.
Pour les surréalistes, l’art produit d’après leur activité onirique n’est plus caractérisé par la recherche du beau mais du « vrai ». Selon leurs dires, le rêve est l’exacte réalité, un double du monde plus lucide. Leur défi est donc d’accéder à l’inconscient et de le retranscrire. L’influence surréaliste en matière de rêve provient de leur connaissance et admiration des travaux de Freud. Leur interprétation relève de l’absurde mais leur démarche se veut rationnelle : le surréalisme présente ses productions comme "résultats scientifiques".     
Pour finir, laissons la parole à André Breton : "Il sera vain, jusqu'à nouvel ordre, de parler en terme de raison. Il s'agit de la reprise systématique de la quête que le XIXe siècle a fait passer par delà toutes les autres préoccupations dites poétiques à partir de Novalis et de Höderlin pour l'Allemagne, de Blake et de Coleridge pour l'Angleterre, de Nerval et de Baudelaire pour la France, et qui devait prendre un caractère véritablement sommatoire avec Mallarmé, à coup sur avec Lautréamont et Rimbaud. Les passions, à ce propos, n'ont pas fini de se déchaîner. Il est fatal que l'ambition -on a dit depuis lors prométhéenne- des poètes que je viens de citer, de forcer les portes du mystère et résolument d'avancer en terre inconnue en dépit de tous les interdits, porte le plus grand ombrage à tous ceux qui se sont confortablement retranchés derrière des barrières existantes et l'on sait que ces derniers sont légion. Leur fureur s’accroît aujourd'hui du fait qu'ils ne peuvent arrêter l'histoire des idées, que la rétrogradation à cet égard est aussi impossible qu'à tout autre. Rien ne peut faire que l'activité poétique, depuis plus d'un siècle aiguillée puis vraiment tendue vers la récupération des pouvoirs originels de l’esprit, consente à reprendre un rang subalterne..." (Entretiens, 1913-1952)

Dans la continuité de l'utilisation du rêve dans la création artistique, le cinéma s'est fait -depuis son origine et plus encore du milieu du XXe siècle à nos jours- le terrain propice pour développer l'univers onirique. Le cinéma permet jeux de mise en scène visuels (filtres, surimpressions, raccords, effets spéciaux, accélérations ou ralentis, inserts) et auditifs. De La Maison du docteur Edwardes d'Hitchcock (Spellbound, 1945) dont la scène de rêve avait été créée par Salvador Dali au récent Inception de Christopher Nolan (2010), le thème du rêve a été largement exploré par de nombreux réalisateurs. Parmi eux, se distingue David Lynch pour qui "tout les films sont des rêves, mais certains un peu plus que d'autres" et dont les films sont marqués par une facture proche du surréalisme, les songes et fantasmes se confondent au réel : la matière se transforme, le temps se dérobe, les jeux de miroirs sont constants.
Il est intéressant de comparer les séquences rêvées des films suivant (EraserheadTwin Peaks et Lost Highway) avec le film Rêves à vendre (Dreams that money can buy) film de Hans Richter racontant l'histoire d'un homme qui vend des rêves sur mesures à ses clients et auquel ont collaboré les artistes réfugiés aux Etat-Unis : Max Ernst, Marcel Duchamp, Man Ray, Alexander Calder, Darius Milhaud et Fernand Léger.



Dreams that money can buy, Hans Richter avec Max Ernst, Marcel Duchamp, Man Ray, Alexander Calder, Darius Milhaud et Fernand Léger (1947)

Eraserhead, David Lynch (1977)

Twin Peaks, David Lynch (1990-1991)

Lost Highway, David Lynch (1997)