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Le surréalisme


Le Surréalisme est un courant artistique et littéraire né au milieu des années 1920 dans la continuité du mouvement Dada. Le dadaïsme naît pendant la Première Guerre mondiale à Zurich. C’est un mouvement intellectuel et artistique affirmant son dégoût de la boucherie que fût la guerre 14-18. L’art s’avère un moyen de provoquer la société. En effet, les dadaïstes et leur chef de file, l'écrivain Tristan Tzara, remettent en cause toutes les contraintes et conventions idéologiques, artistiques et politiques existantes. ls rejettent l'idée de chef d'œuvre et remettent en cause la notion de talent. Des auteurs français ayant lu le Manifeste Dada comme André Breton, Louis Aragon ou Philippe Soupault rejoignent Tzara. Petit à petit, le dadaïsme se désagrège, pour Breton "Dada tourne rond". Deux clans se forment alors : les disciples de Tzara aux idées destructrices et refusant toutes notions d'art positifs voire même d'art, et ceux de Breton voulant instaurer le règne de l’esprit nouveau en explorant avec méthode le domaine de l’inconscient. Ce dernier annonce, dans son Manifeste surréaliste de 1924, l’émergence du Surréalisme, définit ainsi : «SURRÉALISME, n. m. Automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale.» Le terme « surréalisme » apparaît pour la première fois dans une lettre de Guillaume Apollinaire à Paul Dermé en 1917: «Tout bien examiné, je crois en effet qu’il vaut mieux adopter surréalisme que surnaturalisme que j’avais d’abord employé. Surréalisme n’existe pas encore dans les dictionnaires, et il sera plus commode à manier que surnaturalisme déjà employé par MM. les Philosophes. »

Le Surréalisme vise à bouleverser le réel et du même coup l’écriture, en particulier la poésie qui voit l'apparition du poème-image (poème composé d'une suite d'images, souvent série de métaphores), de l'écriture automatique (texte écrit si rapidement que la raison n'a pas le temps d’exercer son contrôle sur le poème), du poème à plusieurs mains voire du cadavre exquis inventé par Jaques Prévert (« jeu qui consiste à faire composer une phrase, ou un dessin, par plusieurs personnes sans qu'aucune d'elles ne puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes.» selon le Dictionnaire abrégé du surréalisme). Ces procédés sont adaptés aux arts plastiques avec apparitions de nouvelles méthodes telles que le collage, le frottage, le fumage, le grattage, la décalcomanie et le cadavre exquis graphique. La sculpture est faite d'objets empruntant au ready-made de Marcel Duchamps  («objet usuel promu à la dignité d’objet d’art par le simple choix de l’artiste.» selon le Dictionnaire abrégé du surréalisme), 
Alberto Giacometti innove avec des figures androïdes longilignes et oeuvres abstraites tandis que l'Américain Alexander Calder invente le mobile (sculpture faite de forme pouvant se mouvoir sous l'impulsion d l'air ou d'un mécanisme). Le photographe Man Ray innove avec ses rayographies (photographies réalisées non avec l'aide d'appareils, mais en plaçant des objets sur une plaque sensible que l’on expose à la lumière) tandis que le cinéma de Luis Buñuel échappe à la logique par un cadre spacio-temporel vague et des images absurdes ou abstraites. Les expositions surréalistes sont l'occasion de franchir les limites de l'oeuvre simple en réalisant performances et installations. Le Surréalisme est -excepté le domaine musical- une expérience artistique totale : peinture, poésie, photographie...

Cette révolution de la forme s'accompagne d'un fond caractéristique. Le cœur du Surréalisme est l'inconscient et ses multiples apparences (folie, rêve, hallucinations...) : «il s'agit, non plus essentiellement de produire des œuvres d'art, mais d'éclairer la partie non révélée et pourtant révélable de notre être où toute beauté, tout amour, toute vertu, que nous nous connaissons à peine, luit d'une manière intense» (André Breton, Second Manifeste du Surréalisme). L'inconscient est rejoint par l'amour comme valeur absolue, la femme et le sexe sont sacralisés, car donnant la possibilité de connaître le monde. Enfin, le Surréalisme promeut la liberté de l'homme, de son esprit et de son potentiel poétique. C'est une révolution qui se lève contre les tabous et traditions de son époque. Comme pour le Romantisme, le rejet de la suprématie de la logique et de la raison ainsi que des conventions et valeurs -en particulier artistiques- a pour but de retrouver une unité perdue, de libérer l'homme et l'esprit.

Peu à peu le groupe se désagrège : quand ils ne sont pas exclus par André Breton (Salvador Dali en 1939, Victor Brauner en 1948 ou Max Ernst en 1954) ou qu'ils ne se soulève contre lui (signataires du pamphlet Un Cadavre de 1930 dont Robert Desnos, Jacques Prévert, Raymond Queneau) , nombre de membres s'éloignent progressivement (René Magritte, René Char) puis la guerre sépare ceux qui restent fidèles à Breton. Ses seuls disciples présents des débuts du groupe à la fin sont Benjamin Peret et Yves Tanguy. Trois ans après la mort de Breton, en 1969, le surréalisme voit sa dissolution. Pour Julien Gracq et André Pierre de Madiargues, Breton est la synthèse de tout ce qui comptait dans le surréalisme: « la puissance déflagrante de l'onirisme et de l'image ». 
Cependant il ne faut pas confondre fin du groupe surréaliste et fin du surréalisme : certains artistes ayant collaboré au mouvement ont continué après 1970 à réaliser des œuvres pouvant être qualifiée de surréalistes qu'ils aient rompu avec Breton (Buñuel, Dalì, Masson, Prévert, Magritte...) ou qu'ils n'aient jamais participé officiellement mais -ayant fréquenté les surréalistes- leurs créations sont "dans la mouvance surréaliste" (Mirò, Delvaux, Giacometti ou Man Ray qui n’adhéreront jamais au groupe malgré leur proximité , Duchamp, Tzara, De Chirico ou Picasso dont seul une partie de l'oeuvre peut être qualifiée de Surréaliste)
Au rendez-vous des amis, Max Ernst (1922)