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Du romantisme au surréalisme, la Belle Epoque : Freud et le symbolisme

Le rêve nocturne: concept freudien


Scientifiquement, il existe 2 phases de sommeil : le sommeil léger et le sommeil profond.

Ces phases se succèdent et se répètent tout au long de la nuit. En général, c’est pendant la cinquième phase, dite phase de Sommeil Paradoxal que les rêves apparaissent.

 Il arrive que certaines personnes rêvent pendant le sommeil léger. Moins riches en détails, ces rêves contiennent moins d’éléments de mouvement, moins d’éléments émotionnels et moins de couleurs par rapport aux autres rêves. Il est possible de maîtriser le contenu de ses rêves, c'est le rêve lucide : rêver en ayant conscience d’être en train de rêver. Ces rêves lucides ont longtemps été l’objet de polémiques mais leur existence a été prouvée formellement dans les années 1970.
Tout le monde rêve, mais certaines personnes ne s’en souviennent pas. Plus on se réveille à un moment proche du Sommeil Paradoxal et plus la probabilité sera grande que l'on s'en souvienne. 
Sigmund Freud, Max Halberstadt (1922)
Freud passionné de lecture dès ses huit ans, s'attribue la découverte de l'Inconscient, à partir de l'étude de ses propres rêves nocturnes et de ceux de ses patients, principalement aliénés mentaux, élabore sa théorie sur ce sujet concernant tout les êtres humains. Pour lui, le rêve n'est pas une chose irrationnelle, il demande à ce qu’on en cherche un sens : il veut rendre l'inconscient conscient. Après la publication de Die Traumdeutung ( L'interprétation des rêves ) en 1900, il pense que les rêves sont les productions de désirs refoulés, par exemple le désir œdipien ou les inséparables Éros (pulsion de vie et donc de plaisir) et Thanatos (pulsion de mort). Ils auraient pour fonction de satisfaire le rêveur. Pour lui, l'inconscient peut faire irruption dans les actes de la vie courante sans qu'on soit capable de l'identifier. La vie quotidienne est donc parsemée de rêves et de rêveries, lapsus, actes manqués qui sont des manifestations de l'inconscient:
« Certains actes en apparence non-intentionnels se révèlent, lorsqu’on les livre à l’examen psychanalytique, comme parfaitement motivés et déterminés par des raisons qui échappent à la conscience. Font partie de cette catégorie les cas d’oubli et les erreurs (qui ne sont pas le fait de l’ignorance), les lapsus, les méprises et les actes accidentels. » Freud, Psychopathologie de la vie quotidienne, 1901.
Page de garde de l’édition originale de l'Interprétation des rêves de Sigmund Freud (1900)
Même si la psychanalyse n'explique pas le don artistique, elle nous indique par quelles voies le don s'est manifesté, et donc ou la puissance de l'inconscient est remarquée. L'œuvre d'art, selon lui, tout comme un rêve, peut exprimer certains désirs refoulés. Les artistes, inconsciemment, produiraient des œuvres dont l'analyse serait expliquée par leurs conflits inconscients. Après avoir utilisé la littérature comme confirmation de ses découvertes sur le rêve, la névrose et l'inconscient, Freud fait pour la première fois l'opération inverse avec la nouvelle Gradiva du romancier allemand Wilhelm Jensen, et utilise ses théories pour essayer d'y voir plus clair dans la significations d'une oeuvre littéraire. En effet, cette nouvelle contient plusieurs récits de rêves. Dès 1895, la notion de sublimation est introduite par Freud. Elle désigne un mécanisme au cours duquel un individu puise la force d'une pulsion sexuelle pour réaliser une activité sans rapport avec l'activité sexuelle. La pulsion sexuelle est sublimée car elle est déviée vers un autre objectif. La sublimation, selon Freud, concerne principalement la créativité artistique.
« Ses créations, les œuvres d'art, étaient des satisfactions fantasmatiques des vœux inconscients, tout comme les rêves avec lesquels elles avaient également en commun le caractère de compromis, car elles aussi devaient éviter d'entrer en conflit ouvert avec les puissances du refoulement. » Sigmund Freud, Freud présenté par lui-même, 1925.
Il est possible de ramener les rêves à des désirs érotiques. Freud défend que même les rêves qui n’ont a priori rien d’érotiques le sont. L’analyse fait apparaître que certains rêves qui semblent « normaux », non érotiques, sont en fait à rattacher essentiellement à des désirs érotiques : les rêves sont bien souvent l’accomplissement de désir de caractère sexuel. Ce symbolisme n’est pas propre au rêve, et peut être retrouvé dans les contes, les légendes ou encore les mythes.
Il existent manifestement des rêves dont le contenu est pénible voire angoissant, ils peuvent alors conduire au réveil du dormeur : ce sont des cauchemars qui ont pour Freud tous un contenu sexuel. C'est à dire que la fonction d'accomplissement des désirs inconscients dans le rêve échoue. Dans le cas des angoisses post-traumatiques, Freud suppose que les cauchemars ont pour but de non réalisation d'un désir mais le développement de l'angoisse absente lors du choc.
La théorie de Carl Gustav Jung ( Sur l'interprétation des rêves ) qui s’oppose traditionnellement à celle de Freud car lui, s’intéresse au contenu manifeste du rêve et se fascine des productions de l'inconscient, la rejoint pourtant en un sens : le rêve découvre et régule les désirs et les angoisses de l’individu dans son intégration à l’environnement. Il envisage le rêve comme un accès direct - ''voie royale'' selon Freud à l’inconscient individuel permettant de l'exprimer. Le rêve pourrait être la production d’un spectacle fantastique se nourrissant de nos fantasmes et de nos angoisses.


Jung et Freud durant un safari en Afrique Subsaharienne, anonyme (vers 1909)
« Le désir conscient ne suscite le rêve que lorsqu’il parvient à éveiller un autre désir, inconscient et de même teneur » Freud.
Ainsi, le rêve ne révèle pas seulement les désirs refoulés, il révèle aussi la totalité du contenu inconscient, ses représentations et ses motions sexuelles.
Le Symbolisme


Référence pour les surréalistes, les artistes  et écrivains symbolistes font un usage des plus importants du rêve. Qu'il s'agisse de littérature (Rimbaud, Verlaine, Lautréamont, Villiers de L'Isle-Adam, Mallarmé) ou dans les arts plastiques (Puvis de Chavannes, Moreau, Ensor, Khnopff, Klimt, Redon, Spilliaert, Klinger) le Symbolisme se présente comme le Romantisme de la fin du XIXe siècle. Le courant symboliste apparaît à la fin du XIXème siècle et s’attache  à représenter l’abstrait et l’invisible -en réaction au réalisme. Reposant sur la certitude que le monde n’est que faux-semblants et qu’il existerait un idéal, il fait le lien entre romantisme et surréalisme : même mal du siècle, même style de vie, même dépaysement, même attraction pour la femme, même attirance pour la mort et même intérêt pour le mental. Ainsi le symbolisme est attiré par la psychologie et le rêve, parallèlement aux travaux  de Freud, notamment par la recherche du symbole. Les tableaux de Klimt, Moreau ou Redon sont les parfaites illustrations des thèses de Freud : les femmes fatales mêlant Éros et Thanatos, complexe d’œdipe ou monstres oniriques.





Ein Leben planche 3 : Träume, Max Klinger ((1883-1884)